Confrontées à une expérience traumatisante, certaines personnes développent un trouble du stress post-traumatique (TSPT). Mais quel est le processus sous-jacent ? Pourquoi le cerveau réagit-il de cette façon ? Cyril Cosar, psychologue clinicien et psychothérapeute au Centre du psychotrauma de l’Institut de victimologie à Paris, nous éclaire sur ce sujet. Il est également le traducteur de l’ouvrage Le Stress post-traumatique pour les Nuls.
D’après l’Organisation mondiale de la santé, environ 70 % des personnes à travers le globe sont confrontées à un événement potentiellement traumatisant au moins une fois dans leur vie, mais seulement une minorité (5,6 %) développe un TSPT. «La probabilité de souffrir de TSPT diffère selon la nature de l’événement traumatisant. Par exemple, les personnes qui ont vécu des conflits armés ou des guerres présentent des taux de TSPT trois fois supérieurs (15,3 %). Les violences sexuelles sont aussi des facteurs de risque significatifs», précise l’OMS. Que se passe-t-il dans le cerveau lors d’une exposition à un tel événement ?
Le mot « traumatisme » provient du grec « trauma », signifiant « blessure ». « Le concept de traumatisme évoque souvent des événements grandioses et rares comme un attentat ou une catastrophe naturelle. Toutefois, les traumatismes sont fréquents et ne font pas toujours la une des journaux. En vérité, presque tout le monde sera confronté au moins une fois à un traumatisme majeur dans sa vie », explique Cyril Cosar.
Selon le DSM-5 – la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux publié par l’Association américaine de psychiatrie – un événement est considéré comme traumatisant s’il implique « une exposition directe à la mort, à la menace de mort, à une blessure grave ou à des violences sexuelles, soit en étant directement impliqué, soit en étant témoin, soit en apprenant que des proches ont été victimes de tels événements ».
Le TSPT peut également surgir après une exposition répétée à la souffrance humaine. Cela affecte souvent les travailleurs humanitaires, les pompiers, les secouristes, les policiers et les professionnels de la santé.
Quels sont les mécanismes cérébraux en jeu lors d’un trauma ?
Face à un danger immédiat, l’amygdale, qui est le système d’alerte du cerveau, s’active et provoque une réaction physique instantanée, avant même que le cortex cérébral ne réagisse. Par exemple, cela peut se traduire par fuir face à un lion ou faire un écart avec sa voiture pour éviter un accident.
« L’amygdale est comme une gare de triage : toutes les informations provenant de l’extérieur y transitent avant d’être redistribuées vers le cortex supérieur, notre disque dur en quelque sorte », explique Cyril Cosar.
L’exemple du serpent évoqué par Joseph Ledoux, neurobiologiste à l’Université de New York, illustre bien ce mécanisme. Imaginez une personne marchant dans la forêt qui aperçoit au sol ce qui semble être un serpent. Immédiatement, l’amygdale déclenche une réaction de retrait rapide du pied pour éviter de marcher sur l’animal. Après un court délai, le cortex traite l’information visuelle et réalise qu’il s’agit en réalité d’un morceau de bois. L’activation de l’amygdale est alors modulée et la réaction physique s’atténue. Autrement dit, une fois le stress dissipé, le calme revient.
Cependant, lors d’un événement traumatisant, cette modulation ne se produit pas. L’hyperactivation de l’amygdale entraîne une production excessive de cortisol et d’adrénaline, provoquant un état de surrégime nuisible pour l’organisme. « Tout se passe comme avec un circuit électrique surchargé : pour éviter des dommages, le système se met en sécurité, déconnectant les appareils pour les protéger, mais ils cessent de fonctionner», explique le Dr Muriel Salmona, psychiatre et présidente de l’association Mémoire Traumatique et victimologie, sur le site mémoiretraumatique.org. « Cela se produit dans le circuit limbique du stress qui va ‘disjoncter’ en déconnectant l’amygdale ».
Normalement, nous intégrons de manière continue et naturelle les événements qui nous marquent. Cependant, lors d’événements particulièrement douloureux, cette intégration peut s’avérer plus compliquée. « Après l’événement, il est courant de vivre des reviviscences sous forme de flash-backs et/ou de cauchemars, d’avoir des difficultés à se concentrer, des troubles du sommeil, et d’être en état d’hypervigilance : c’est ce que l’on nomme l’état de stress aigu, indique Cyril Cosar. Il s’agit d’une période pendant laquelle le cerveau ‘digère’ l’événement. Normalement, au bout d’un mois, le souvenir est archivé. Toutefois, chez certaines personnes, cette intégration échoue et les symptômes deviennent chroniques, menant au TSPT ».
Comment reconnaître un trouble du stress post-traumatique ? Quels en sont les quatre principaux symptômes ?
Le trouble du stress post-traumatique se manifeste par différents symptômes : des reviviscences de l’événement, des comportements d’évitement, une hyperactivité neurovégétative, et une altération négative des pensées et de l’humeur.
Reviviscences et cauchemars
Les symptômes intrusifs peuvent se présenter sous forme de flash-backs diurnes de l’événement et de cauchemars nocturnes, ainsi que de pensées obsédantes.
Comportements d’évitement
Pour combattre les pensées intrusives et les reviviscences, le patient peut adopter des stratégies d’évitement, en esquivant les discussions, les lieux ou les personnes qui lui rappellent le trauma.
Hyperactivité neurovégétative
Cette hyperactivité se traduit par un état d’alerte constant, des sursauts au moindre bruit, de l’irritabilité, et des troubles du sommeil.
Émotions négatives
Le patient peut également ressentir de la colère, de la tristesse, une culpabilité ou de la honte.
À quel moment faut-il consulter un psychologue ou un psychiatre ?
« La souffrance était si intense que même aller acheter du pain devenait un calvaire, raconte Jennifer, patiente au Centre national de ressources et de résilience (Cn2r). Je ressentais une peur intense, bien que consciente de l’absence de danger réel, avec des pensées intrusives qui revenaient sans cesse. Plus je tentais de les éviter, plus elles s’imposaient. »
Il est recommandé de consulter un professionnel de santé – psychologue ou psychiatre – spécialisé dans le traitement du TSPT lorsque les symptômes ont un impact significatif sur la vie quotidienne. « Les personnes atteintes de TSPT sont en état de surrégime continu, ce qui peut également entraîner d’autres problèmes tels que des douleurs chroniques, des maux de tête, des troubles gastro-intestinaux, des brûlures d’estomac, ou même des problèmes cardiovasculaires comme l’hypertension, précise Cyril Cosar. C’est une double peine. »
Quelle est la durée d’un TSPT ?
La durée des symptômes du trouble du stress post-traumatique peut varier de plusieurs mois à plusieurs années si la maladie n’est pas traitée. D’où l’importance de consulter un professionnel de santé. « Jusqu’à 40 % des personnes atteintes de TSPT se rétablissent dans l’année suivant l’événement», selon l’Organisation mondiale de la santé.
Quel traitement pour le trouble du stress post-traumatique ?
Le traitement du trouble du stress post-traumatique repose avant tout sur la psychothérapie, notamment les thérapies cognitives et comportementales centrées sur le trauma ou les thérapies par exposition et l’EMDR (désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires). Dans les cas les plus graves, un traitement médicamenteux peut être envisagé, notamment avec des antidépresseurs – les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) – qui sont bien tolérés et recommandés dans ces situations.
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